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Nous re partons faire un tour
22 avril 2020

Ce n’est qu’un au revoir

 

(Écrit confortablement en soirée à Tamaris)

 

La tempête sanitaire était bien installée sur la France ce lundi matin. Un ciel bas, une pluie froide mouillait les ponts supérieurs du Magnifica. La météorologie était triste de voir la fin d’un merveilleux voyage. Le froid faisait trembler les rares photographes qui, avec moi, voulaient immortaliser cet instant du retour. À l’intérieur du bateau, l’ambiance était plus chaleureuse. C’était le temps du dernier café partagé, d’une dernière embrassade. La distance de sécurité entre les personnes, nous en avions entendu parler, mais jamais nous ne l’avions pratiquée. Alors, j’en ai profité. Je me suis fait une réserve de bisous d’amitié, de quoi tenir quelques mois de confinage. Nous avons échangé nos adresses et quelques mots doux. Nous avons espéré nous revoir un jour sur un autre bateau. Nous nous sommes souhaité le meilleur pour les jours à venir. Du balcon de ma cabine, j’ai regardé avec émotion, les derniers mètres de la croisière. Déplacement latéral, lent, centimètre par centimètre, le bateau s’est approché du quai. Il n’y a pas eu de choc. Cent mille tonnes ont frôlé avec délicatesse les appuis du quai. Les soixante mille kilomètres du tour du monde arrivaient à leur terme.

Il est encore un peu tôt pour faire un vrai bilan de ce voyage. Serai-je capable de le faire un jour ? Je ne pourrai procéder que par touches de couleur, chaque teinte évoquera un sentiment, un ressenti particulier. Ces touches seront parfois contradictoires, parce qu’apportées à l’esprit par des images différentes à des moments différents. Aujourd’hui, il faut que je classe ces images, tant dans mon ordinateur que dans mon esprit. Un jour, je vous montrerai les images de mon ordinateur, celles de mon esprit, j’essaie de vous les raconter. En parler, pour vous, pour moi, car j’ai besoin encore de me persuader que cela a bien existé.

Hier, nous avons fait le pas sur la passerelle, celui qui laisse le bateau derrière et qui pose le pied sur le béton froid et mouillé du quai de la Joliette. Passage de douane en sortant deux par deux. La douanière sur un ton gentil me dit : Alors, c’est la fin de la galère ? Je lui ai répondu, tout aussi aimablement : Mais non Madame, nous rentrons d’un voyage fantastique. Je viens d’embrasser mes amis, hier au soir au diner, avant le homard, nous avons dégusté un excellent crabe en buvant un Prosecco bien frais. Est-ce que c’était mieux à terre ? Nous nous sommes souri, je suis allé récupérer nos deux cents kilogrammes de valises. Un porteur m’a aidé à les charger dans le coffre d’un autocar, direction gare de Marseille. Là-bas, un taxi est venu nous chercher, retour calme dans notre nid de vacances. L’appartement était aéré, notre voisine avait garni le réfrigérateur la vie continue, simple et heureuse.

Nous aurons connu la vie sur un bateau de croisière qui va d’escale en escale. Bonheur de découvrir d’autres pays, de rencontrer d’autres personnes, d’autres cultures. Pour cela, nous n’avons eu que des visions fugitives. Nous ne pouvons pas dire que nous connaissons le Brésil en ayant passé une journée à Salvador et deux jours à Rio. Mais nous avons rapporté de belles images de Salvador et de Rio. Avec cela, nous sommes plus riches. À Buenos Aires, j’ai pu assouvir mon fantasme. Non, ce n’était pas le tango, quoi que ! Mais le plaisir de déguster un très confortable steak de bœuf argentin dans le quartier de la Boca, avec des danseurs de tango (des vrais) à côté de moi. Ce souvenir-là, personne ne pourra me le voler. Monsieur Alzheimer peut-être ? Mais, vous avez sans doute suivi ce dédale de visites posées sur une ligne dessinée sur une mappemonde. Annie vous les a si bien racontées.

La croisière, c’est aussi ce bateau élégant, confortable, immense, luxueux qui se glisse sur les mers. Nous avons parcouru 60 000 kilomètres à une vitesse de 30 kilomètres par heure. J’ai consulté un éminent mathématicien qui m’a déclaré péremptoirement que cela fait 2000 heures de navigation. La majeure partie du temps, nous avons donc navigué. Non, ne me posez pas la question : Est-ce que tu as connu l’ennui ? Non, non, non et non, jamais. Je n’ai pas eu le temps. Trop de propositions, trop de sollicitations, que des instants agréables. Si, une seule chose un peu ennuyeuse dans ce voyage. C’est l’évolution de mon tour de taille qui a pris des proportions qui frisent l’indécence. Je ne connais pas mon poids, un ressort de la balance a cassé lorsque j’ai posé un pied dessus. Combien d’heures ai-je passé à regarder la mer ? J’étais fasciné par ce tableau toujours changeant. Ah, Jacques, Claude, Annie M, auriez-vous été à mes côtés pour en peindre la beauté ? Je ne m’ennuie jamais à regarder la mer, parce qu’elle alimente mes rêves. Si vous me demandez aussi : Avez-vous dansé ? Je vous répondrai : Oui, tous les jours, parfois plusieurs fois. Il y a cinq pistes de danse sur le bateau. Mais, si vous me demandez si j’ai bien mangé, alors là, je ne vous répondrai pas. Ou bien, il vous faudra accepter que je prenne la parole pendant une dizaine d’heures. Avant de partir, j’avais pris la précaution essentielle d’acheter un forfait pour les boissons du type cocktail et apéritifs. Je vous rassure, ce forfait a été très, très largement amorti. Pour cela, Annie m’a été d’une aide précieuse.

Le troisième voyage d’une croisière, c’est celui de la vie dans une collectivité de trois mille personnes qui vivent dans un espace qui, bien que grand, a des limites physiques. Dans ce nombre, j’inclus les autres passagers et les personnes de service. Nous étions cinquante-huit nationalités à bord. Nous nous sommes babelisés ! cinq langues officielles à bord, répétées à chaque information sonore. J’ai pu parler italien, les gens de la botte étaient nombreux. J’ai aussi beaucoup parlé anglais quand je pouvais partager la langue. Merci, Joy pour ta patience pour me faire progresser dans cette belle langue et me l’avoir fait aimer. Ce voyage de rencontres a été meublé par de nombreux moments partagés avec d’autres couples ou de personnes seules. Salut à vous Paulo le costaud, et Maryse l’exquise, nous nous sommes rencontrés au repas du soir, le jour de l’embarquement. Nous avons partagé tous nos diners quotidiens, jusqu’à la bise, hier le long de la gare Saint-Charles. Coucou à vous aussi, agréables dineurs, Dany et Guy qui regardez l’océan depuis le balcon de votre appartement de Pornichet. À vous quatre, vous avez été notre belle rencontre de ce voyage. Je ne veux pas oublier ces deux-là, qui à chaque arrivée dans un port, je retrouvais, comme un rendez-vous sur le balcon avant pour faire des photos inoubliables. À l’instant, j’ai perdu votre nom, Thierry, il me semble, je ne suis plus sûr. Quand je parlais de vous, pardonnez-moi, je disais : les infirmiers. Vous savez ces gens qui donnent en plus des soins, du bonheur aux autres et pour qui le monde entier est reconnaissant, le temps de passage d’un virus. Vous m’avez disputé lorsque je n’étais pas assez chaudement habillé. Votre métier, vous ne l’exercez pas seulement dans les hôpitaux, mais aussi dans votre cœur. Ensemble, nous avons eu des larmes en nous quittant, parce que nous sommes forts. Au revoir aussi, Anita et Yves, qui vivent en Allemagne. Nos discrets voisins de cabine avec qui il a été si bon de partager quelques bouteilles de vin pétillant.

Le quatrième aspect de ce voyage est aussi celui que nous avons passé avec vous. Vous qui nous avez accompagnés dans la lecture de nous divagations épistolaires. Nous sommes fiers d’avoir, grâce à vous, eu plus de six milles sur notre blog et plus de quinze mille pages ouvertes. Merci pour cette belle fidélité. J’ai, nous avons eu le plaisir de l’écriture, nous continuerons encore quelque temps de donner des nouvelles post tour du monde.

Mon instituteur, à l’école primaire de La Verpillière, avait raison. Je l’ai vérifié, la terre est ronde. Il y a plus d’un an, j’ai dit à Annie, viens, je t’emmène faire un tour. Aujourd’hui, je lui demande : Quand est-ce que l’on repart ? Bientôt !

Prenez soin de vous.

 

© Pierre Delphin – 21 avril 2020

 

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Commentaires
L
Encore et toujours de belles émotions dans ce joli texte! On fait toujours de belles rencontres en croisière. <br /> <br /> Merci de nous avoir fait partager votre beau tour du monde....A bientôt. <br /> <br /> Evelyne
Répondre
N
beaucoup d'émotion dans ce texte, mais quels merveilleux souvenirs pour toujours.
Répondre
Nous re partons faire un tour
  • Quelques mots, quelques photos, quelques confidences pour partager avec notre famille, nos amis, nos bonheurs et nos découvertes lors de ce merveilleux voyage qui partira le 6 janvier de Marseille et qui se terminera dans le même port le 4 mai 2023.
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