Premiers tours d'hélices

10 janvier 2023

Virginie et Fabien nous ont aidés à pousser le lourd chariot chargé de nos trois grandes valises, surmontées de trois autres bagages plus modestes. Compte tenu du volume, il était clair que nous n’étions pas des naturistes en recherche d’une plage spécialisée. Les formalités d’enregistrement sont souvent fastidieuses. Elles l’ont été ; mais globalement d’une manière acceptable. Après un dernier bisou, nos deux Sherpas ont repris la route pour rejoindre leur campagne.

Dans la file pour enregistrer les bagages, notre présence avec eux était devenue aléatoire. À chaque instant, nos conversations étaient interrompues par les retrouvailles avec les amis et connaissances du parcours 2020. Enfin, les premiers pas sur le Poesia se sont faits presque dans l’indifférence des personnes qui connaissent le terrain, des gens d’expérience. Le Poesia est identique au Magnifica.

Très vite nous avons trouvé notre cabine 12052. Elle est confortable. Sans perdre de temps, nous avons pris en main l’organisation pour retrouver nos marques. À 18 h, une première promenade dans les nombreux couloirs, puis sur le pont arrière pour voir le bateau quitter le port de Marseille. Feu vert à droite, feu rouge à gauche. La mer, à cet instant, nous appartenait, nous appartenions à la mer. Émotion d’un instant difficile à décrire.

L’effervescence forte dans les couloirs était faite de rires, de petits cris de retrouvailles. Une forte impression de collège le jour de la rentrée. Est-ce que ces trois ans passés se sont effacés par magie et que cette période de contraintes s’est éloignée comme après un arrêt sur image. La vie, les mouvements reprenaient une existence, une consistance. Bien sûr, beaucoup d’embrassades de mots partagés pour se dire le bonheur d’être là, ensemble, après cette épreuve de vie qui nous laisse changés dans ce que nous sommes, même si chacun de nous ne veut pas le laisser paraitre.

Le soir, premier repas où chacun a une place affectée. Mais, où chacun en veut une autre parce qu’il veut être avec ses amis. Les organisateurs ont dû se coucher fatigués ce soir-là !

Le lendemain, quand les yeux se sont ouverts, le bateau était déjà à l’amarre dans le port de Barcelone. Très vite, le soleil a brillé sur la capitale catalane. Il nous attendait. Promenade main dans la main dans le vieux quartier gothique. Petites ruelles où le soleil n’affleure presque jamais le pavage. Après maintes hésitations, nous sommes arrivés vers notre objectif, le musée Picasso. Cet artiste, grand maitre de la peinture du siècle dernier, nous propose dans cet environnement moderne, l’ensemble des périodes dans lesquelles son art a pu se développer. Nous pouvons aimer des périodes, moins d’autres, mais cet art ne peut pas être contesté. Pour moi, beaucoup de découvertes qui ont positivé la vision que j’avais de cet artiste. Je reviens de cette visite avec dans ma mémoire vive, non seulement des peintures, des dessins, des sculptures, mais avant tout, l’expression de la liberté. Liberté de faire, d’agir, d’entreprendre sans s’accrocher à des références formatées.

Le retour du musée s’est fait à pas lents dans d’autres ruelles qui conduisent au port. Sur le bateau, notre lit fut un bien doux réceptacle à notre heureuse fatigue. Le soir, les convives des tables s’étaient retrouvés par affinité. Le bonheur tranquille de la croisière prenait sa place.

Souvent, le dimanche est considéré comme une journée tranquille. Cette tranquillité attendue a largement été affectée par des attentes interminables pou faire paramétrer notre informatique par les techniciens du bord. Il aura fallu quatre heures pour que l’on me dise que mon ordinateur n’était pas paramétrable. Déception, colère, puis apaisement. Puis, comme le soleil brille aussi dans l’amitié, un ami québécois m’a prêté un autre ordinateur pour, entre autres, envoyer ce message sur notre site internet et ainsi vous donner de nos nouvelles et rester en contact avec nos amis que nous n’oublions pas.

La vie à bord a pris sa routine. Quelques petits changements par rapport à notre expérience précédente. Ces modifications, ces services minorés, montrent que la compagnie a eu des souffrances budgétaires. Sans doute un tiers des passagers voyagent à demi-tarif !

Ce lundi se déroule tranquille avec, encore, une journée de pleine mer. Plus nous avançons, plus le ciel se dégage, le printemps est déjà là ! Demain nous accosterons à Funchal, sur l’ile de Madère, où nous attend une sortie organisée. Ensuite, plusieurs jours de pleine mer où nous serons sans doute dans le silence de la communication internetique.

Pierre – lundi 9 janvier 2023