Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Nous re partons faire un tour
25 février 2023

Humanité

 

Au début de cette écriture, nous sommes le 16 février, il est presque 10 heures du matin. Hier, nous étions le 14 février. Nous avons follement fêté le jour de la Saint-Valentin. Je viens de me relire, je n’ai fait aucune faute de frappe, ni dans les lettres ni dans les chiffres. Nous avons fêté la Saint Valentin très correctement, nous sommes tous des amoureux, mais sans l’utilisation de produits spécifiques à un déraillement cérébral. Pour continuer dans la confusion, je dirais qu’hier nous avions une demi-journée de retard par rapport à l’horloge de notre maisonnée. Aujourd’hui, nous avons une demi-journée d’avance par rapport à la même référence. Ainsi va la vie des navigateurs au long cours. Relisez les aventures de Phileas Fogg ! Partout nous voulons l’égalité, mais même l’heure n’est pas la même pour tous. Cumul du destin, aujourd’hui, non seulement nous faisons du jumping sur la ligne de changement de date, mais nous passons la ligne tout aussi fictive de l’équateur. Ainsi, sur la rotondité de notre planète, nous passons sur ce point mystérieux où l’on change de date et d’hémisphère. D’ailleurs, l’administration de la navigation internationale a marqué ce point en déposant une flaque d’eau salée sur l’océan.

Interprétez tout ce charabia en considérant que le voyage se poursuit dans la sérénité. Ce matin, assis sur mon balcon, une dernière tasse de café à la main, je regardais le bateau glisser sur cette étendue calme. Était-ce le bateau qui avançait sur l’eau ou l’eau qui s’écoulait contre son flanc ? Seul un roulis marqué m’indiquait que je n’étais pas dans mon jardin. L’effet rocking-chair ressenti m’était très agréable, même s’il donne des nausées à d’autres passagers. Le matin, lors d’une journée de traversée, c’est le moment où les sportifs mouillent leurs maillots. Certains nagent pédalent, marchent, soulèvent des poids dans la salle de gymnastique ou sur les ponts supérieurs. Mon exercice physique de ce matin consiste à soulever mon stylo tout neuf et à le faire glisser adroitement sur la feuille beige de mon carnet (merci Virginie). L’effort est important, j’aurai sans doute dépensé plus de deux calories lorsque je poserai mon buvard blanc sur mes gribouillages.

Malgré une animation générale pas toujours bien maitrisée (bien en deçà de notre expérience de 2020), chacun se faufile pour trouver des petites pépites de bonheur. Il y en a qu’il faut chercher, s’impliquer, regarder, participer. Je me suis lancé dans le chant choral. J’y trouve beaucoup de bonheur, depuis le temps à viré au gris. À l’instant de ce point, le pianiste s’entraine pour un prochain concert. Je ne reconnais pas l’œuvre, peut-être Debussy, je ne suis pas sûr. Du salon voisin, des notes égarées d’un rock and roll. Mélange étrange, mais chargé de vie. Studieuse, à côté de moi, Annie prépare son prochain opus pour vous prendre par la main et partager avec vous nos pérégrinations, comme elle sait si bien le faire. Mon temps d’écriture est entrecoupé par des personnes qui passent, viennent nous dire bonjour. Nous échangeons quelques mots avec parfois un mélange linguistique hasardeux. Souvent ma mémoire me fait défaut, je ne retiens pas tous les noms. Je suis hésitant dans les rencontres, tutoiement ou non, quelle langue, francophonie, italien ou anglais ? Mais, finalement même dans l’erreur, la communication devient agréable.

Ce petit village sur l’eau, aux limites bien déterminées, provoque pour les particules humaines que nous sommes des chocs, des rencontres comme celles des atomes dans un cyclotron. Passage dans un couloir, arrêt dans un salon, geste de la main, hochement de tête, quelques mots, une bise. Les rencontres sont là. Est-ce que les super ingénieurs du cyclotron de Genève ont envisagé, un jour, que les particules ne s’entrechoquaient pas, mais qu’elles s’embrassaient. Il serait temps de mettre de la poésie dans la physique nucléaire.

Tous nos bavardages ne sont pas futiles, ils sont utiles à chacun. Ils nous permettent d’entendre les autres. Les autres qui disent la même chose que nous, mais avec d’autres mots, avec une autre sensibilité. D’autres qui ont une opinion divergente basée sur le même regard et qui provoque une tentative de remise en cause afin de progresser dans un point de vue. Je pense à toutes ces personnes avec lesquelles j’ai le bonheur de parler, de bavarder, d’échanger lorsque le bateau est en errance sur l’étendue de l’océan. De quoi parle-t-on ? De banalités, bien sûr, mais des banalités de grande importance au moment où elles sont dites. Nous évoquons la dernière escale, ou celle qui est à venir. Nous racontons le plaisir de dernier spectacle. Nous ne manquons pas le sujet de conversation universel : Notre santé ! Je n’aurai pas l’outrecuidance de dire que c’est un sujet bateau, mais il faut bien dire qu’il est très adaptable dans tous les langages, la gestuelle visuelle et sonore venant compenser d’éventuelles lacunes de vocabulaire. Dans ce domaine-là, nous trouvons une aide précieuse avec notre compagnie de croisière. Elle s’est donné des moyens efficaces pour orienter les passagers vers le service médical. Une gestion fantaisiste de la climatisation dans les différentes zones du bateau est parfaitement propice aux états bronchitiques et à la consommation d’amoxicilline. Entre deux quintes de toux, je dis cela en plaisantant bien évidemment.

Il est aussi des rencontres calmes. Un livre que l’on pose, un avis échangé avec un voisin sur le contenu. Puis, hésitante, la discussion s’engage sur le contexte de l’histoire, sue les faits, sur les émotions apportées. Un moment plus tard, la discussion prend fin, le livre oublié sur les genoux. Le bavardage ne correspond plus au contenu imprimé, mais des pensées ont été échangées, confortées. On s’éloigne d’un petit signe de la main, comme pour dire : Merci pour cet instant.

 

Pierre Delphin

52Huma

 

attention il y a sans doute ci_dessous des publications d'Annie que vous n'avez pas lues..............

 

Publicité
Publicité
Commentaires
L
Merci pour nous transcrire votre ressenti. Je viens de tout lire, belles proses de vous deux.<br /> <br /> Bonne continuation, il doit être 11h sur votre bateau ou bien à Sydney. Bises à vous deux.
Répondre
Nous re partons faire un tour
  • Quelques mots, quelques photos, quelques confidences pour partager avec notre famille, nos amis, nos bonheurs et nos découvertes lors de ce merveilleux voyage qui partira le 6 janvier de Marseille et qui se terminera dans le même port le 4 mai 2023.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Nous re partons faire un tour
Newsletter
9 abonnés
Visiteurs
Depuis la création 16 922
Publicité